Blog de Julien Cotte

Egalité Homme/Femme : il faut aller plus loin et s'autoriser à être innovant

C'était la fête des mères et bientôt la fête des pères. Derrière les intentions commerciales, se cache tout de même une envie en France de faire évoluer la société vers plus de parité, plus d'équité et de reconnaissance des différents status (en tout cas je veux y croire).

C'est pourquoi, il faut poursuivre les discussions, faire passer de nouvelles lois, faire entendre les voix de chacun. Ne pas mettre les uns contre les autres, les elles contre les ils, les ceux contre celles...bref vous m'avez compris. Nous vivons ensemble, commençons par vraiment le faire sans nous opposer.

De nombreuses femmes pâtissent de la situation : être femme (désirable, désirée...par leur conjoint), être la reine de la maison, être une maman exemplaire, prendre soin de sa santé (sport, diététique...) et être au top au boulot en faisant des horaires pas compatibles avec la vie. Et tout ça s'intensifie quand les hommes continuent à être insupportables : remarques sexistes, laisser tout faire à leur femme à la maison, leur mettre la pression parce qu'elles ne sont pas à leur dispo H24, elles doivent moins travailler mais gagner plus d'argent...

Et sans parler du regard des autres. Les moralisateurs, les experts en tout genre style BFM TV qui parlent mais ne vivent pas la situation au quotidien. 

D'un autre côté, nombreux hommes subissent aussi des revers. C'est établi que les hommes doivent gagner plus d'argent sinon perte de virilité, bosser 20h par jour pour respecter le deal avec l'employeur...Ils doivent à tout prix faire le bricolage à la maison, doivent être forts, doivent être la rigueur et le cadre des enfants en grondant...ils doivent plus participer aux tâches ménagères mais à la façon de leur femme car sinon ce n'est pas bien, et si ils ne font pas ce n'est pas bien non plus. Ils doivent être des pères aimants, présents et être attentifs aux états d'âmes de leur femme et enfants...

Des pressions de part et d'autre car les rôles bougent, les femmes veulent accéder à l'autonomie financière, être indépendante et les hommes veulent être des pères à part entière, ne plus vivre que pour le boulot...certes cela fait longtemps que le mouvement est enclenché mais nous vivons un tournant à mon sens en ce moment.

Tout ça pour dire que la société se cherche et fait subir aux hommes et femmes des pressions pour voir ce qui tient, quel changement pourra passer ou non...les hommes sont tellement ancrés dans les valeurs du passé qu'ils ont du mal  à sortir des schémas établis. Quand ils tentent des échappées vers un monde meilleur, ils sont rattrapés par la masse et l'effet boomerang se fait ressentir très vite.

Compte tenu de tous ces éléments, la vie en entreprise est fortement impactée et les évolutions sont encore plus lentes. Pourquoi? Je ne l'ai jamais compris. Je me suis dis que c'était parce qu'au boulot on peut se permettre d'être des idiots complets car le business l'oblige, parce que le fait de faire un métier, d'avoir des contraintes par rapport à nos clients, nos partenaires...ne nous permettent pas de respecter les autres. L'ascension sociale et la reconnaissance par autrui et par soi même vient en grande partie de sa place en entreprise. Cela engendre donc des comportements qui ne devraient pas avoir lieu. 

Pourtant ce n'est pas si compliqué que ça de reconnaître les compétences d'une femme, de reconnaître qu'un homme a aussi le droit d'être père et de s'occuper de ses enfants...Non ce n'est pas compliqué. Alors pourquoi avons-nous encore autant d'inégalité de traitement? Pourquoi les femmes ne sont pas payées au même salaire que les hommes à compétences et postes équivalents? Pourquoi les hommes n'ont-ils pas un congé paternité équivalent en mois à celui des femmes (j'entends déjà les femmes dire que les hommes ne portent pas l'enfant pendant 9 mois...argument d'un autre temps selon moi)? Pourquoi les hommes ne prennent ils pas plus de temps partiel? Pourquoi les femmes n'accèdent pas plus facilement à des postes à fortes responsabilités?...?

Une des causes selon moi est la réticence au changement et donc la peur et la perte de repères. Nous vivons avec notre passé. Et que dis notre passé ? Femme à la maison et homme au charbon. Tout le monde s'accorde à dire que c'est idiot mais nous sommes encore ancrés dans cette répartition des tâches. De ce fait, un homme qui souhaite un temps partiel pour élever ses enfants passe pour un extra terrestre. Une femme qui veut des responsabilités doit se comporter comme un homme pour réussir...quelles bêtises!

Et si nous changions vraiment les choses ? Et si nous arrêtions d'avoir peur de cette nouvelle évolution de notre espèce ? Et si les hommes et les femmes vivaient tranquillement comme ils l'entendent sans avoir le poids de l'histoire et le regard méprisant des autres. 

Pour cela, les politiques ont un rôle à jouer bien entendu. Mais les entreprises n'ont pas besoin d'attendre. Mais pour cela, il faut accepter de sortir du cadre traditionnel du travail. Il faut repenser le rapport au travail des hommes et des femmes de l'entreprise. Il faut prendre en compte que les nouvelles générations acceptent de donner beaucoup à leur employeur mais à condition de pouvoir mener une vie saine chez eux. Toutes les tendances actuelles montrent que de nombreux "jeunes" veulent s'épanouir autant au travail que chez soi. Le travail ne suffit plus pour briller en société. Le fait de vivre pleinement sa vie personnelle fait parti des critères de réussite de nos jours. Cela ne veut pas dire avoir un modèle de famille ou de vie mais de savoir vivre sa vie, à sa manière...

C'est donc aux chefs d'entreprise, aux DRH de réussir à créer un climat de confiance, des cadres qui permettent d'avoir suffisamment de flexibilité et d'agilité pour que les objectifs de l'entreprise soient atteints tout en tenant compte des différentes vies que les salariés veulent vivre. 

Il faut donc remiser les accords ou cadres qui ne conviennent qu'à une seule vision de la vie. Il faut savoir se doter de plusieurs outils ou accords qui permettent au plus grand nombre de concilier et réconcilier performance et bien être en entreprise et dans sa vie personnelle. Cela doit passer par l'acceptation que les salariés peuvent avoir différents modes de vie. De ce fait, la personne qui fait des heures de dingues n'est pas forcément le meilleur élément de l'entreprise. L'homme ou la femme qui utilise des absences pour enfant malade n'est pas un bon à rien qui fait passer sa vie perso avant la bonne santé de l'entreprise. 

Je pense donc qu'il fait arrêter de parler uniquement d'égalité homme / femme ou femme / homme (pour ne vexer personne ;)) mais il faut plutôt s'attacher au mode de vie et mode de travail. Par exemple, une mère ou un père célibataire qui a la garde de son ou ses enfants doit pouvoir manager son temps plus aisément entre sa vie perso et pro. Des aménagements d'horaires peuvent peut être être trouvés...et cela ne doit pas être vu comme une baisse de rendement ou de performance mais bien comme trouver le bon équilibre pour permettre à son salarié de s'épanouir, ce qui aura de façon évidente un retour positif pour l'entreprise. 

Un autre exemple, une personne qui a un engagement associatif fort devrait pouvoir bénéficier de dispositif en entreprise lui permettant de combiner ses deux activités. 

J'ai conscience que l'entreprise n'est pas là pour s'adapter à tous les salariés mais je pense que nous pourrions être innovants pour permettre à certaines situations de trouver des solutions. Le télétravail est une des solutions marquantes des dernières décennies. C'est reconnu mais toujours assez limité dans certaines entreprises. Bien entendu, il faut tenir compte du contexte et l'environnement dans lequel l'entreprise évolue mais je suis convaincu que dans tout secteur d'activité, si on se donne la peine et que l'on s'autorise à y réfléchir des solutions peuvent être proposées. 

A nous de poursuivre et de favoriser les évolutions nécessaires dans nos entreprises pour que tout à chacun puisse s'épanouir dans son job et dans sa vie. N'est-ce pas un beau projet pour les RH que nous sommes? J'entends déjà les sceptiques disant que c'est bien beau tout ça, que dans la vraie vie cela ne se passe pas comme ça...et je suis bien placé pour le savoir. Mais il est hors de question de baisser les bras. Donc amis RH, innovez, proposez, essuyez un échec, recommencer, construisez les fondations nécessaires pour avancer sur ces sujets. Et amis Directeurs Généraux, membres de Conseil d'Administration, libérez vous un peu sur ces sujets et osez prendre les décisions qu'il faut pour faire en sorte que votre entreprise soit saine financièrement, commercialement ET humainement.

Le métier des Ressources Humaines : un métier que tout le monde peut faire, et pourtant...

Encore quelques mois (bon ok plus d'un an, mais quand même!) et je vais bientôt avoir 20 ans d'année d'expérience dans le métier des Ressources Humaines. Que le temps passe vite...enfin, pas sur tous les sujets. 

En effet, même si à l'échelle d'une vie, plus on avance, plus le temps s'accélère, lorsque l'on se place à l'échelle d'un métier, plus on avance et plus...en fait, rien ne change. 

Au cours de mes expériences professionnelles, des débats, conférences, échanges, partages...un thème est revenu sans cesse : la place du métier de RH dans l'entreprise. Depuis mes débuts, les RH essaient de faire grandir leur fonction, de leur donner plus de crédibilité, plus d'importance. Nous avons collectivement réussi de grandes avancées comme être présent dans les Comités de Direction, comme être rattaché au Directeur Général, comme imposer de plus en plus des pratiques RH, de management...et pourtant, après avoir rouler ma bosse depuis presque 20 ans, j'entends encore que n'importe qui peut faire de la RH, que les RH ne comprennent rien aux métiers qu'ils sont sensés accompagnés, qu'ils n'apportent que de la complexité là où nous avons besoin d'agilité, qu'ils sont chiants car ils défendent trop la loi...en résumé que de chemin parcouru et pourtant que de chemin encore à parcourir.

Je tenais donc à poser ici mes réflexions en la matière. Pourquoi? Parce que je suis persuadé que le métier de RH est l'un des métiers les plus beaux et les plus respectables. Parce qu'il est encore un métier avec d'énorme a priori. Parce que c'est un métier de conviction, celle de la place de l'humain au coeur de toute chose. Parce que c'est mon métier et que j'en ai assez d'entendre les autres parler de mon métier sans le vivre de l'intérieur. Et enfin, parce que nous avons encore tellement de chose à faire pour faire évoluer notre métier !

Mais, au fait, c'est quoi le métier RH ? 

La fonction RH est la fonction qui permet à tous les salariés, fonctionnaires, dirigeants, syndicats, d'être recruté, de recevoir un contrat de travail, de recevoir une paie, de se former, d'être accompagné dans sa carrière, d'être accompagné face aux difficultés. La fonction RH c'est la fonction qui fait le lien entre les intérêts de l'entreprise/de l'administration et les intérêts et besoins des collaborateurs. C'est également la fonction qui, par le biais de la négociation sociale, apporte de nouvelles solutions de gestion de l'entreprise, de bien vivre en entreprise...C'est la seule fonction qui peut apporter à la fois des conseils aux managers, responsables, chef d'entreprise tout en délivrant des conseils aux salariés. Bien entendu, la fonction RH ne peut fonctionner seule et sa plus grande force c'est d'avoir compris ce principe de base ! La fonction RH est là pour faire vivre des individus au sein d'un collectif et le tout dans la meilleure harmonie possible. Et force est de constater que lorsqu'une direction d'entreprise s'intéresse à ce sujet, porte ces valeurs et travaille en binôme avec les RH, l'entreprise peut alors avoir un atout supplémentaire pour réussir. 

La RH, un métier que tout le monde peut faire? 

Oui, je suis le premier convaincu qu'une fonction RH doit être composée à la fois de spécialiste de la fonction mais également d'experts du domaine d'activité du coeur de métier de l'entreprise. Une fonction RH composée que d'expert RH se gargarisera de mettre des belles procédures en place, de reproduire strictement les schémas sortis des livres, écoles et conférences et passera à côté de l'essentiel à savoir : réussir à adapter les grands principes de la RH à l'entreprise. On n'accompagne pas de la même manière une usine ou un centre de recherche ou une administration. A contrario, une DRH composée uniquement d'opérationnels sera hors tellement en symbiose avec les équipes qu'elle en oubliera de jouer son rôle de contre pouvoir sur certaines décisions, ne sera pas en capacité d'apporter des innovations RH permettant de faire évoluer l'entreprise, la culture de l'entreprise et donc l'accompagnement des salariés. De ce fait, une DRH mixte est la meilleure solution. Par contre, il ne faut pas que les RH rejettent les opérationnels ayant fait une évolution de carrière vers la RH sous prétexte qu'ils ne connaissent pas le métier, et a contrario, il ne faut pas que les nouveaux RH estiment que les RH sont nuls car ils ne comprennent pas le métier de l'entreprise...la bienveillance partagée est la clé de la réussite de cette mixité.

Par ailleurs, il est vrai que tout le monde peut venir à la RH. C'est en effet une évolution de carrière assez réalisable. Il est plus simple de devenir RH après avoir été ingénieur en télécommunication que l'inverse. Et pourtant...le métier RH est également un état d'esprit, des valeurs, des principes humanistes forts, une envie farouche de faire évoluer les entreprises pour que le travail redevienne un espace de valorisation sociale, d'estime de soi...Le métier RH se doit de tenir tête face aux nombreuses dérives auxquelles l'être humain peut être tenté de succomber. Et ça, ça ne s'apprend pas dans les livres. Cela doit être porté par chacun, et je pense que nous oublions trop souvent ce sujet car c'est le plus complexe à faire respecter en entreprise. 

La RH doit poursuivre son évolution et opérer une nouvelle mue.

Entendre encore aujourd'hui que la RH est un métier empêcheur de tourner en rond, qu'elle ne connait même pas les métiers qu'elle accompagne donc ne comprend rien à rien aux besoins des salariés...et bien c'est agaçant pour quelqu'un comme moi qui défend des valeurs de respect d'autrui et l'envie de faire réussir l'entreprise dans laquelle j'évolue ! Mon analyse sur le sujet est que les personnes qui tiennent ces propos n'ont soit rien compris à notre métier, soit ne veulent surtout pas que la RH s'immisce dans leur communauté de sachants de peur d'être trop chamboulés dans leurs pratiquent. Quoi qu'il en soit, cela montre bien que la fonction RH doit poursuivre son évolution. Et pour cela, j'ai plusieurs pistes (pour certaines déjà connues, mais ça me fait du bien de les rappeler) que je souhaitais vous proposer (n'hésitez pas à mettre en commentaires votre ressenti par rapport à ces propositions et me faire part de votre propre réflexion sur le sujet) :

1. il faudrait que l'on arrête de parler comme des RH. Je sais ! c'est difficile car tout métier à son jargon mais le nôtre se doit d'être adapté au métier de l'entreprise. Même si les principes et les axes de travail sont les mêmes, je me suis aperçu que défendre ses convictions de RH en utilisant les mots communément admis dans l'entreprise est beaucoup plus aisé. Cela ne veut pas dire renoncer mais plutôt à garder en tête que le fond est plus important que la façon donc on l'énonce. Car au final, la réussite d'un salarié est plus importante que le fait d'appeler la personne un salarié, un collaborateur, un individu ou autre.
2. il faudrait que l'on arrête de mettre la procédure en avant lorsque nous faisons quelque chose, mais plutôt parler du gain que cela va apporter à l'utilisateur final. Les procédures sont primordiales, mais devons nous sans cesse dire : "non ce n'est pas la règle, ce n'est pas la procédure...". L'équité de traitement est très souvent bien comprise en entreprise. Le plus dure est de la faire réellement respecter. 
3. il faudrait arrêter de se sentir comme la fonction mal aimée et plutôt expliquer ce que nous faisons, pourquoi nous le faisons et relever la tête. D'expérience,c'est très dur dans certains cas face à certains individus, mais cela fonctionne tout de même. Peut être par le biais de la méthode des petits pas, mais petits pas signifient que l'on avance quand même ! 
4. il faudrait accepter ce que nous sommes, et ne pas vouloir être DG à la place du DG (j'en ai entendu des propos de ce type de la part de DRH et cela m'a toujours étonné)
5. il faudrait renforcer notre capacité à réaliser des compromis en comprenant que Rome n'a pas été fait en 1 jour et qu'une entreprise reste un collectif qu'il faut savoir ménager de temps en temps tout en poursuivant son objectif. Il faut aussi apprendre que des fondations sont nécessaires avant de lancer d'autres chantiers. 

En relisant, cela fait très bateau comme propos, mais combien d'entre nous applique réellement ces principes? Nous tenons tellement à défendre notre fonction que l'on va user de toutes nos forces pour convaincre et influencer mais malheureusement, parfois, en oubliant que l'influence commence déjà dans la compréhension de l'autre et de la prise de conscience que le changement n'est pas aisé notamment en matière de ressources humaines. Combien de manager essaie de faire de leur mieux, combien de RH récite les plans d'action appris par coeur sans aller plus avant dans le problème rencontré, combien de manager se décourage et tape sur la RH par défense parce qu'ils sont démunis...

Alors, oui, tout le monde peut faire de la RH, et pourtant...c'est à nous, RH de profession, de faire grandir notre métier en nous ouvrant vers les autres et en nous nourrissant de leurs idées, savoirs et critiques envers notre fonction. Il faut une sacrée résilience pour y arriver, mais ce n'est qu'après ce travail que la nouvelle ère de la RH pourra commencer.